Guillaume Deleplace
Guillaume Deleplace Scrum Master chez Cbp

Formation et distance, est-ce vraiment compatible ?

Formation et distance, est-ce vraiment compatible ?

J’ai eu l’occasion de suivre en janvier dernier une formation sur “Faciliter et former à distance”. Elle avait lieu au bon moment pour plusieurs raisons :

  • Je devais animer une formation d’initiation à l’agilité en interne. Celle-ci était initialement prévue début 2020. Entre-temps, il y a eu la Covid et nous attendions un retour sur site pour la re-planifier ;
  • L’équipe dans laquelle j’évolue travaille à distance depuis le début de la crise et animer les réunions et ateliers d’équipe est plus difficile qu’en présentiel.

Comme le retour sur site n’était pas prévu pour tout de suite, je me suis résigné à la donner à distance. J’avais déjà une certaine expérience de la facilitation à distance depuis le début de la crise sanitaire mais animer toute une journée de formation était un vrai challenge pour moi.

Cette formation est construite comme une initiation à l’agilité avec au programme :

  • Le Manifeste Agile et ses dérivés (Heart of Agile, Modern Agile) ;
  • Les principaux frameworks agiles : Scrum, Kanban et Extreme Programming ;
  • Deux ateliers collaboratifs : Artistes et Spécifieurs et Lego4Scrum ;
  • Des moments de partage.

Et le tout dans un PowerPoint d’une cinquantaine de pages.

Il ne me reste plus qu’à convertir la formation en distanciel. Plus facile à dire qu’à faire… Plusieurs points me viennent à l’esprit :

1. Les outils

Nous utilisons déjà Google Meet et Miro pour nos ateliers à distance. C’est suffisant pour la visioconférence et le support de formation. Pour rendre la formation encore plus dynamique, j’intègre la solution AhaSlides dans mon support numérique qui permet de proposer des questionnaires plus engageants et interactifs pour les apprenants.

2. La théorie

Je me rends compte en adaptant cette formation pour du distanciel que j’avais construit la formation sur une quantité conséquente d’apports théoriques malgré les ateliers prévus. Je me rappelle m’être fait la remarque que j’avais l’impression de redescendre un savoir sur les participants plus que d’être dans un état d’esprit d’échange et de partage.

Je choisis donc de m’appuyer sur des vidéos en ligne d’une dizaine de minutes pour présenter les notions clés. Elles vont à l’essentiel et permettent de varier le ton de la formation et j’axe les conversations sur les problématiques de l’équipe.

3. Le cadre

Que ce soit pour une réunion, un atelier ou une formation, le cadre est indispensable. Il permet de définir les règles de fonctionnement afin que les échanges aient lieu dans les meilleures conditions possibles.

Dans le cas d’une formation à distance, se voir entre participants est obligatoire et pour cette raison, j’insiste beaucoup sur la mise en marche de la webcam. Sur cette formation, je n’ai eu aucune résistance de la part des apprenants. D’autres éléments interviennent et ont leur place dans le cadre comme le respect, l’écoute et la participation. Cela peut sembler évident mais les rappeler est toujours utile.

Si vous avez l’habitude d’animer des rétrospectives, présenter la Directive Première est pertinent en début d’atelier.

4. La gestion du temps

En ce qui concerne la gestion du temps, je m’appuie sur les études de la chronopsychologie. Pour information, selon l’ouvrage Psychologie du Travail et des Organisations, la chronopsychologie est “une discipline qui étudie, à des fins de compréhension mais aussi d’aménagement, les rythmes comportementaux, cognitifs et psychiques humains. […]. Concernant le travail, elle permet de saisir comment le travailleur réagit organiquement, psychologiquement et comportementalement à la façon dont est organisé son temps de travail”.

Avec un temps de concentration moyen de 30 à 60 minutes, je dois faire en sorte que les apprenants soient régulièrement stimulés afin de ne pas les perdre pendant la formation.

De plus, on considère que l’attention des participants est à son optimum entre 10h-12h et 16h-18h. Malheureusement, comme la fatigue se fait plus rapidement sentir en visioconférence, les formations ne doivent pas dépasser les 6 à 7 heures par jour.

5. L’attention

L’attention étant étroitement liée à la gestion du temps, j’ai découpé la formation en petits blocs afin de garder un rythme dynamique avec des échanges en petits groupes à la fin de chaque bloc. Enfin, centrer les conversations sur leurs problématiques d’équipe les implique davantage.

Ce travail de construction d’une formation à distance m’a permis de prendre conscience de contraintes auxquelles je n’avais pas prêté attention jusqu’à maintenant et m’a donné de nouveaux éléments pour améliorer la version présentielle :

  • Proposer du contenu plus dynamique aux participants ;
  • Meilleure gestion du ratio théorie/pratique ;
  • Plus centrer les conversations sur les difficultés de l’équipe ;
  • Favoriser les échanges en petits groupes.

En conclusion, adapter une formation présentielle vers du distancielle ne se résume pas à un simple copier-coller, la formation doit être repensée entièrement pour s’adapter aux contraintes de la visioconférence, du télétravail et des participants.

De plus, elle peut être une source d’apprentissage pour le formateur en lui proposant un point de vue différent sur un contenu qu’il maîtrise. Une formation, qu’elle soit sur site ou à distance, a la même valeur. Et pour répondre à la question du titre de l’article, formation et distance sont compatibles et permettent d’ouvrir de nouvelles perspectives.

La crise sanitaire a accéléré de manière significative la diffusion du télétravail en bouleversant notre organisation traditionnelle du travail. A nous de nous adapter pour tirer bénéfice de la situation afin d’améliorer nos pratiques et usages.